le vent me gifle à la figure, glisse sur ma peau, s'enroule finalement dans mes cheveux et les emmêle. j'ai la vive impression de décoller de la voiture et de voler dans les airs du colorado, les bras ouverts et le cœur léger. une rafale menace de me faire tomber par dessus bord, quelqu'un a poussé sur la pédale de vitesse. whooouuu! c'est un seul cri qui sort de ma gorge déployée et se répercute sur les montagnes pour aller agonir dans une vallée lointaine. la nature est si grande, si impressionnante et je me sens si faible par rapport à elle, mais si puissant par rapport aux autres êtres humains qui peuplent la terre. je vis, à cet instant, un rêve, un voyage inoubliable que personne, ou très peu, ont réalisé dans leur vie. en tout cas, je n'ai encore jamais rencontré quelqu'un qui ai fait le tour des états-unis dans une voiture la plus pourrie qui soit. et avec, sur lui, trois dollars six sous. seul jack kerouac tel que je l'ai lu à travers ses ouvrages l'a vécu. jack accompagné de ses camarades. hey le fou, on va s'arrêter à la prochaine ville. faut qu'on s'remplisse le bidon. Je jette un regard au conducteur qui est obligé de crier pour que je l'entende. pas d'problème meryl! meryl, c'est un gars sympa, simple, qui ne maugrée pas comme moi toutes les dix minutes, qui prend ses problèmes à cœur. on est devenu super potes tous les deux. on est lié comme les doigts de la main, d'après mes parents. c'est le premier gars que j'ai rencontré sur le campus de l'université de san francisco. on a occupé la même bicoque et nous voilà embarquer dans ce voyage de folie. et voilà maintenant deux mois que je roule avec lui, à la recherche d'adrénaline et d'aventures, n'importe lesquels. ça te dis qu'on s'prenne une p'tite cuite ? il me reste du pognon, pas beaucoup, mais assez pour payer un tournée générale.

il est 7 heures 30 et je suis dans les locaux du journal à attendre que l'impression se finisse. meryl s'en occupe, il est entré dans ce service en même temps que moi, puisque nous nous sommes retrouvé dans ce merdier. quand on parle du loup, le voilà ce con. il adore son job. un peu trop d'ailleurs. personnellement, je n'aime pas le voir s'encrer dans cette ville, s'y attacher. en vérité, ojai me fout la chair de poule. plus j'y pense, plus je me dis que notre séjour ici n'a aucun sens. au début, nous étions pris au piège. on ne pouvait pas partir de cet endroit. bizarrement, je n'y ai pas pensé. meryl et moi étions trop occupés à chercher notre voiture, n'importe quelle voiture. seulement, elle était partie pour de bon et le village -le hameau- n'en possédait aucune. bizarre ouai. depuis quelques mois, j'me pose de plus en plus question. cette malédiction. disons que j'y ai pas cru dès l'début. j'ai été élevé par des gens illuminés du bulbe, mais y'a des limites. on n'est pas dans un putain de conte de fée ici. et voilà bro, les nouveaux ragots du village, y'en a des bonnes ahaha. je sors de mes pensées rebelles et fais un clin d'oeil à meryl. merci mon poussin. je lui lance alors un sourire sarcastique. j'aime bien le taquiner cet imbécile. c'est dommage que je tienne bien trop à lui, sinon je serais dehors à marcher sous le soleil et la pluie s'il le faut pour retourner à san francisco. mais meryl a du oublié le passé. on en parle presque plus et j'ai pas envie de le perdre. alors j'me la ferme. mais je sais qu'un jour, j'vais craquer, quand ça brûlera trop à l'intérieur.