" You give up your childhood. You miss proms and games and high-school events, and people say it's awful... I say it was a good trade. You miss something but I think I gained more than I lost. "
La vie est un long parcours sinueux que l’on se construit au quotidien. Un parcours parsemé souvent d’embûches, mais aussi parfois de petits bonheurs auxquels il faut se raccrocher. Ce sont pour ces bonheurs que la vie vaut la peine d’être vécue, malgré les combats qu’il faut mener pour avoir la chance d’en profiter. Certaines personnes ont un départ privilégié dans la vie, d’autres démarrent dans des conditions difficiles et pour d’autres encore comme Logan et sa petite sœur, c’est un départ des plus banals. Un père, une mère, en apparence qui s’aime, lui d’abord qui vient agrandir la famille Reid, suivi cinq années plus tard par sa petite sœur Eleanor. Ce n’est que quelques mois après ce dernier évènement que les choses se compliquèrent.
Des pleurs retentissent dans la petite maison mitoyenne située à La Nouvelle-Orléans, en Louisiane. Le petit garçon âgé de pas encore tout à fait six ans dort profondément, emmitouflé dans sa couette, bien à l’abri dans sa chambre. Les cris de bébé redoublent. Logan se réveille et s’assoit dans son lit en sursaut, clignant des yeux pour s’habituer à voir dans l’obscurité de la pièce. La pièce qui d’ordinaire possède des couleurs vives d’enfant parait presque sinistre sans aucune source de lumière, le jeune garçon suffoque, panique un peu, sans vraiment en comprendre la raison, panique amplifiée par les pleurs de sa petite sœur. Il a l’habitude maintenant de l’entendre pleurer la nuit, il ne râle jamais, parce qu’on lui a expliqué que c’est normal, que les bébés n’ont pas encore le même rythme que les enfants comme lui. Seulement d’ordinaire, les pleurs cessent rapidement, mais pas cette fois et ça lui fait peur, ça l’intrigue. Logan descend rapidement de son lit et dans la précipitation il se cogne à la porte en ouvrant. Pourtant il ne bronche pas et court jusqu’à la chambre de ses parents.
« Maman, maman ! Pourquoi Ellie elle arrête pas de pleurer ? » Aucune réponse. Le petit garçon reprend de plus en tambourinant à la porte de la chambre parentale
« Maman t’es là ? » Toujours sans réponse, il se permet d’ouvrir la porte et ne trouve que son père, assis sur le bord du lit double, des larmes lui roulant sur les joues, le bébé dans les bras. Logan porte un regard plein d’incompréhension vers cet homme qu’il a toujours vu fort et fier.
« Pourquoi tu pleures papa ? Et pourquoi Ellie elle arrête pas ? Et maman elle est où ? » À cette dernière question, monsieur Reid est incapable de retenir ses sanglots, augmentant les cris de la petite Eleanor. Le garçon court se blottir contre son papa pour le consoler, même s’il ne sait pas pourquoi. Après quelques instants comme ça, le bébé se calme au contact de son grand frère, Logan sourit et relève le visage vers son père qui lui murmure doucement
« Je suis désolé Logan... Maman est partie. » Sur le moment, le garçon n’avait pas compris ce que son père avait voulu dire, mais les jours suivants il mesura pleinement les paroles de son paternel. Sa mère était partie de la maison sans même lui faire un bisou, sans lui dire au revoir. Elle est partie et elle ne reviendra plus. Logan pleure souvent, il a besoin de sa maman, il est encore trop petit, et pourtant, c’est son rôle de grand frère qui prime sur sa peine. Il n’a que six ans et il s’occupe d’Eleanor comme un grand.
« Laisse papa, je le fais. » Cette phrase il la dit plusieurs fois par jour, que ce soit pour préparer et donner le biberon à sa sœur ou faire un peu de ménage dans la mesure de ses moyens. Logan grandi vite, trop vite d’un coup, mais il a compris qu’il ne peut plus se permettre de faire le bébé, que son papa ne peut pas s’occuper de lui et de sa sœur en plus de son travail. Le départ de sa mère l’a rendu plus mâture qu’un enfant de son âge.
" It takes courage to grow up and become who you really are. "
Son sac à dos sur le dos, Logan se dépêche de quitter son boulot au garage où il a réussi à trouver une place après avoir quitté le lycée. Les études ne l’intéressent que très moyennement, et il était impatient d’atteindre l’âge de pouvoir aider financièrement son père et d’améliorer leur quotidien à tous les trois.
« Ellie où tu vas comme ça ? » En grand frère protecteur, ayant parfois, voire souvent pris le rôle de père pour sa cadette, il s’inquiète constamment pour elle et encore plus quand il l’a voit se préparer pour sortir alors que la journée s’achève.
« Je vais chez Madie, je te l’ai dit hier Logan. On est samedi et demain il n’y a pas école, tu avais dit oui. » L’adolescent soupire, il n’aime pas trop savoir sa petite sœur hors de la maison, mais il se rappelle de la conversation et de sa promesse, il ne reviendra donc pas dessus, mais il ne peut s’empêcher de lui prodiguer quelques conseils avant qu’elle ne sorte.
« D’accord, mais tes devoirs devront être fait et surtout, vous ne sortez pas de chez elle ce soir, à moins d’être sous la surveillance d’un de ses parents. Je te fais confiance. » Il lui fait confiance bien sûr, sa sœur est plutôt douce et calme, pas vraiment rebelle dans l’âme, mais il sait aussi qu’elle est à un âge critique ou l’on aime tester ses limites, et puis il est un peu trop protecteur envers elle, et se fait du souci pour un rien.
Une fois un dernier câlin donné à la jeune fille, Logan file à la douche pour se préparer pour son second boulot. N’étant pas majeur et sans diplôme, son salaire au garage n’est pas mirobolant et il a eu, grâce à une connaissance, l’opportunité de faire quelques extras les vendredis et samedis soir, comme agent de sécurité dans une boîte de nuit du quartier. Comme il n’a pas les accréditations pour faire officiellement ce métier pour le moment, et puis encore trop jeune pour être crédible à l’entrée, sa tâche consistait à surveiller l’intérieur.
« Logan arrête un peu de draguer tout ce qui bouge, t’es pas là pour t’amuser ! » Le jeune homme soupire, s’excuse auprès de la demoiselle avec qui il était en train de discuter. À l’intérieur, il a rarement grand-chose à faire, majoritairement son travail consiste à prévenir les bagarres avant qu’elles ne commencent. Du coup, cela lui laisse pas mal de temps pour s’adonner — contre les ordres — à son activité favorite, celle de tester son pouvoir de séduction sur les demoiselles présente. Il aime les filles et les filles le lui rendent bien. Après tout, il est jeune, il peut largement se permettre d’en profiter pour s’amuser un peu. Et de toute façon, il ne compte pas se caser, il n’a aucune confiance dans les femmes, excepté en sa sœur.
« Que tu t’amuses et en profites, je comprends. Ce que je comprends moins, c’est pourquoi tu traites les filles de cette manière. » Le regard de Logan dérive sur le côté, évitant les yeux de son meilleur ami. Il est gêné, parce que la réponse est un sujet qu’il n’aime pas aborder. Ses proches amis sont au courant que sa mère à quitter le domicile familial quand il est tout gamin, mais il n’a jamais expliqué qu’elle avait tout lâché, emploi, mari et enfant, du jour au lendemain, sans rien dire, sans un au revoir, pour aller refaire sa vie avec un autre homme. «
Ma mère nous a abandonnés, je vois pas où c’est si difficile à comprendre. » Le châtain s’énerve un peu, les larmes aux yeux, cela lui fait toujours mal de parler de ce passage de sa vie qu’il considère comme un abandon et que depuis qu’il sait ça, il n’arrive à faire confiance à aucune femme. D’ailleurs il a fait foirer toutes les conquêtes de son père. Ce n’est pas qu’il ne voulait pas qu’il retrouve le bonheur, il voulait le protéger d’une nouvelle déception.
" I think that inside every adult is the heart of a child. We just gradually convince ourselves that we have to act more like adults. "
La stabilité, Logan et sa sœur ne la connaissent pas. Enfin, si un peu, ils ont l’un et l’autre comme repère, pour se soutenir et se serrer les coudes, ils sont ce qui tient encore leur père debout. Mais trop mal après que sa femme l’a quitté, il a décidé de changer de vie, de repartir de zéro, c’est ainsi qu’ils ont quitté La Nouvelle-Orléans pour Phoenix.
« Oh non, pas encore s’il te plaît, on commence tout juste à s’habituer et à se faire des amis. » Phoenix n’a été que le premier déménagement des Reid, qui ont traversé le pays ne restant jamais bien longtemps au gré des humeurs du paternel. Il n’y a pas un seul endroit où le jeune homme a réussi à se sentir chez lui. Enfin si, une ville a su le captiver et lui donner l’envie d’y retourner.
« Je ne l’ai pas encore dit à papa Ellie, je suis désolée de te laisser, mais j’ai trouvé un emploi à Los Angeles, et tu sais combien j’aime cette ville. » Le jeune homme qu’il est devenu aujourd’hui a enfin réussi à obtenir un diplôme et surtout de quoi exercer le métier d’agent de sécurité en toute légalité. Il sert sa sœur contre lui, il s’en veut de la laisser derrière lui pour le moment, mais il lui promet que dès qu’elle sera majeure, elle pourra venir avec lui. Si cela ne tenait qu’à lui, il l’emmènerait déjà avec lui, seulement il n’est pas son tuteur, bien qu’il a tenu ce rôle pour elle depuis le départ. Sauf qu’elle a fait sa vie aussi de son côté et qu’à sa majorité, elle ne l’a pas rejoint dans la cité des anges comme ils se l’étaient promis.
« Promis ma belle, je prends des vacances et je viens te voir. [...] Je t’aime aussi. » À peine le temps de raccrocher que la main de sa petite amie, qu’il n’a pas entendu rentrer, vient se poser assez violemment sur sa joue en une claque sonore. Logan la regarde surpris, ne comprenant pas ce que lui vaut ce geste.
« Bonjour à toi aussi. » La jeune femme le regarde d’un air méprisant, mais la lueur qui brille dans ses yeux humides indique au châtain qu’elle est blessée.
« Fais pas l’innocent, je t’ai entendu au téléphone. » Il hausse les épaules ne comprenant toujours pas pourquoi elle lui en veut. «
Je parlais seulement avec ma sœur, il est où le problème. » Sa copine, furax, lui en recolle une et va s’enfermer dans leur chambre. Logan frappe à la porte, la suppliant de lui expliquer, puis il abandonne au bout de quelques minutes restant sans réponse. Maintenant, il sait pourquoi il a toujours été réticent à se caser et se demande ce qui a bien pu lui prendre quand il s’est mis avec Kerlie. La demoiselle ressort enfin de la chambre trente minutes plus tard, le jeune homme écarquille les yeux en voyant l’énorme sac qu’elle porte. Il reste coi un moment et ne trouve rien à lui dire, il a compris et au fond, il s’en fiche, ce n’est que son orgueil qui en prend un coup, il est celui qui quitte ces demoiselles, jamais ne l’inverse.
« Je me casse Logan, j’en ai marre. » Cela ne l’étonne même pas. Limite, il se demandait quand cela arriverait, lequel sauterait le pas le premier. Après tout, il est loin d’être un modèle de fidélité, c’était stupide de se caser avec quelqu’un et il comprend à peine comment elle a fait pour supporter ses nombreuses incartades sans plus broncher que ça, jusque-là. Il ne va pas lui en vouloir, au final c’est mieux comme ça, plus de compte à rendre, liberté retrouvée. Logan la laisse s’en aller sans dire un mot, en se promettant de ne plus se laisser reprendre dans la spirale d’une vie de couple.
Le volume sonore de l’autoradio baissé, il roule au ralenti, ne sachant absolument pas où il se trouve. Le panneau indiquait le nom de la rue Ocean Avenue, mais il ne voit nulle part d’indication de chemin. Logan s’impatiente, soupire, jure. Il maudit son père de déménager si souvent. C’est la première fois qu’il fait le trajet depuis Los Angeles jusqu’à la nouvelle maison où vivent son paternel et sa cadette. Il a promis à Eleanor d’être là pour son anniversaire, et s’être perdu en route ne lui plaît pas du tout. Un semblant de sourire apparaît sur son visage, enfin une indication vers un village, il s’y dirige sans réfléchir, il y trouvera bien une personne sympa qui saura lui expliquer comment retrouver son chemin. Une fois passé le panneau de Bienvenue, il fait encore quelques mètres puis s’arrête pour tenter dans un premier temps d’appeler sa sœur et la prévenir.
« Maudit village perdu au milieu de nulle part. » Il peste, évidemment, il ne capte rien avec son cellulaire. Il avance, se rapprochant un peu des habitations à pied, espérant tout de même capter un peu de signal pour appeler Ellie, mais rien, absence totale de réseau. Logan essaie de se calmer et retourne à sa voiture, le mieux, se rendre dans le centre du village et demander de l’aide, il y aura bien une personne pour le dépanner pour qu’il puisse téléphoner.
« Alors là, c’est le pompon. » Voilà maintenant que sa voiture refuse de démarrer. Il s’énerve, sort et donne un coup de poing de rage dans la carrosserie. Il se résout à aller à pied, à la rencontre d’un villageois.
« Bonjour mademoiselle, désolé de vous déranger. Je me suis perdu par ici et ma voiture est en panne. Il y a un garage par ici ? » Logan se montre poli, souriant, bien qu’agacé par la situation et pourtant la jeune femme semble réticente à l’aider.
« Merci. » Finalement, elle accepte. Sur le chemin qui les mène au garage, il l’observe, un quelque chose chez elle l’attire. Indéniablement, elle est sublime, avec ses longs cheveux foncés et ses grands yeux clairs, tout à fait le style de femme qu’il aime, mais au-delà de l’apparence physique de la demoiselle, c’est ce côté sauvage qui se dégage d’elle qui intrigue Logan. Le jeune homme aimerait bien comprendre pourquoi elle montre de l’animosité envers lui. Ce n’est que le soir, en recroisant Camryn, dans le bar du village et qu’elle lui explique la légende qui entoure Ojai qu’il comprend sa réaction lors de leur rencontre. Sa venue implique une mort. Est-ce qu’il est prêt à croire à ce genre d’histoire ? Non, pas vraiment et il compte bien le lui faire comprendre.